Lilith Ellen Osbourne est née en 95 en fille unique dans un foyer très pauvre de Denver. Ses parents étaient très jeunes, et son père avait du arrêter ses études pour pouvoir s’occuper de la fillette. Il avait alors 20 ans, et sa mère, elle, était encore plus jeune. Fille unique, elle restait très souvent toute seule, n’avait pas tellement d’amis, et ne faisait jamais rien de ce que lui disaient ses parents. Une petite fille puis une adolescente désobéissante et rebelle. Ces deux mots lui correspondent très bien. Très tôt, elle commença à fumer et à boire, parce que c’était « stylé ». Elle était méchante et agressive avec ses parents et faisait le contraire de ce qu’ils lui disaient. Elle était vulgaire aussi. Toujours en train de jurer ou dire des obscénités. Elle fit toujours comme ça. Du moins, on ne peut pas tellement parler de son adolescence parce qu’elle fut arrêtée trop tôt. Bien trop tôt.
Le jour de son 16e anniversaire, ses parents lui firent une annonce. Ils lui dirent qu’elle avait une sœur. De deux ans son ainée. Il l’avait faite adoptée par un homme des Bahamas parce qu’ils étaient trop jeunes et encore trop pauvres pour pouvoir l’élever. Là, Lilith explosa. Pourquoi ? Pourquoi il l’avait abandonnée elle ? Pourquoi est-ce qu’elle était encore là à en parler ? Deux jours plus tard, elle fit une valise avec ce qu’elle put prendre avec elle et mit les voiles. Grâce à l’aide d’une grande amie et voisine qui faisait régulièrement des allers et retours entre Denver et Nassau, elle put rejoindre la ville de sa sœur. Elle lui en sera éternellement reconnaissante pour ça.
Avec une photo que lui avaient donné ses parents, Lilith rechercha sa sœur, Chanel. Elle finit par la retrouver en mai 2011. Elle était majeure et avait déjà un appartement. La jeune fille et Chanel vécurent alors ensemble. Très pauvrement. Chanel, elle avait un boulot de serveuse alors Lilith décida de trouver aussi un travail. Elle devint vendeuse dans une boutique en centre-ville. Bien vite, les deux jeunes filles se rendirent compte qu’elles n’allaient pas s’en sortir ainsi. C’est comme ça qu’elles se lancèrent dans le deal de drogues.
Un certain temps passa ainsi. Un an peut-être. Lilith venait tout juste d’avoir 17 ans. Elle sortait discrètement de son bâtiment pour s’en rendre vers un autre. Toute une « livraison » de drogues dans son sac à dos. Maintenant, elle avait l’habitude de faire tout ça. Elle ne craignait plus d’être surprise comme avant. Elle restait calme mais précautionneuse dans tous ses gestes et mouvements. La jeune fille allait vers un appartement et le contourna pour se rendre dans l’un de ses coins sombres, presque inaccessible. Là, se trouvait un jeune homme, Kevin Winter. Elle l’appelait Winter. Il était un « client ». Et elle était le camion de livraison. Winter faisait partie d’un gang et elle était là pour donner la came. Ils se voyaient très souvent tous les deux. Pas qu’ils soient très amis, Lilith le considérait un peu comme son grand frère, un grand frère de deal. Elle avait confiance en lui et Winter semblait beaucoup l’apprécier.
Comme si tout un régiment était caché dans les fourrés, au moment où la jeune fille avait sorti la marchandise de son sac, des flics arrivèrent de nulle part et lui tombèrent dessus. Elle enfila très rapidement la capuche de son sweat et Winter et elle s’enfuirent à toutes jambes. Lilith s’était souvent entrainée à la course, dans le cas où une situation du genre venait à se présenter. Lilith courrait, Winter commençait à la distancer. À un moment, elle trébucha sur quelque chose au sol et chuta. Dans un élan de désespoir, elle jeta à un œil à son collègue, qui ne s’était même pas arrêté. Elle n’oubliera jamais cet instant et ne pardonnera jamais ce moment.
Emmenée au poste, on lui qu’elle pouvait espérer en avoir pour 2 ou 3 ans de taule. Heureusement pour elle, elle était encore mineure, donc elle n’eut pas à payer le plein prix : elle aurait droit à un an d’enfermement. Elle fut incarcérée le 14 mars 2013. Cette date restera à jamais dans sa mémoire. C’est le jour où son enfer commença.
Elle fut mise dans la prison pour femmes de Nassau. La cellule dans laquelle on la mit fera d’elle ce qu’elle est aujourd’hui : une jeune fille distante, peu sociable et ingérable. Dans la cellule qu’on lui a attribuée, elle fit la connaissance de Amber, une jeune fille un peu plus vieille qu’elle, qui devint très vite la seule personne à qui elle pouvait parler. Il y avait aussi deux autres femmes là-dedans : Michelle, une femme de la quarantaine insupportable et une un peu plus jeune qu’elle, qui ne parlait jamais et ne communiquait pas. Elle cru comprendre par Amber que son nom était Lindsey.
Dans cette prison, le temps semblait de multiplier par 10. Des minutes semblaient des heures, des semaines des décennies. Même avec la présence d’Amber qui lui était de plus en plus indispensable, Lilith passait le temps comme on pouvait le faire en prison : n’importe quoi devenait une occupation. Elle fumait. Beaucoup. Encore plus qu’avant. Elle était tout le temps assise près de la petite fenêtre de la cellule, et elle regardait ce qu’elle pouvait voir du dehors, de la vie qui se passait là-bas. Elle se mettait à chanter des fois. Et si Michelle essayait de l’interrompre en lui criant dessus, Lilith répliquait au quart de tour et elle aussi poussait sa gueulante. Dans cette prison, elle perdait toute patience, et acquérait ce qu’elle appelle aujourd’hui sa « fougue ». Elle ne se laissait pas faire parce qu’elle avait vite compris qu’elle se ferait bouffer toute crue si elle jouait la gentille petite fille. Elle jouait les grosses dures parce qu'elle n'avait pas le choix. De toute façon, Lilith était devenue agressive et ingérable envers la plupart des gens là-bas. Sauf Amber qui était désormais sa meilleure amie et Lindsey, avec qui elle s’entendait plutôt bien.
Son comportement avait certes changé, mais son caractère aussi en avait pâti. Durablement. Elle n’était qu’à la moitié de son enfermement qu’elle commençait à péter les câbles. Encore plus instable qu’avant, elle restait seule, et refusait des fois même la compagnie d’Amber. Près de sa fenêtre, la clope à la bouche, elle ne faisait plus rien. Elle s’embrouillait toujours autant avec Michelle, ce qui avait le don de l’enrager. Cette folle semblait vouloir tout faire pour la chercher. Au 6e mois de sa détention, Lindsey partit et elles ne se retrouvèrent qu’à trois dans la cellule. La tension s’élevait souvent entre les deux jeunes femmes qui ne pouvaient plus du tout se blairer. Amber, elle préférait rester en dehors de tout ça, parce qu’elle savait que ça finirait mal. Et elle avait raison. Un jour, les deux femmes se tapèrent dessus jusqu’à ce que deux gardiennes arrivent et les séparent, avec l’aide d’Amber qui tenait les bras de son amie. On dit à Lilith qu’elle risquait de prendre des mois en plus si elle continuait comme ça. Cette menace fonctionna à merveille et elle se tint à carreau : jamais elle ne resterait ici plus longtemps.
Quand Lilith n’eut plus que 2 mois à supporter, Amber sortit. Le peu qui restait de santé mentale à la jeune fille s’écroula. La seule qui parvenait plus ou moins à la contenir était partie. Ce qui signifiait qu’elle se retrouvait face à face avec Michelle. Pendant quelques jours, ce fut le véritable enfer : la vieille, qui semblait ne pas tenir à sortir de là, ne faisait que lui envoyer des pics pour la faire craquer. Heureusement pour Lilith, quelqu’un le remarqua et lui ordonna d’arrêter. Elle reprit la cigarette de plus belle. 2 semaines plus tard, une autre détenue arriva. Pas plus de trente ans, et avec un calme remarquable. Les geôliers avaient sans doute voulu mettre quelqu’un de sage avec les deux furies qui étaient ensemble depuis plus de 10 mois. Les « chamailleries » et insultes qu’elles échangeaient encore étaient aussitôt arrêtées par la nouvelle venue du nom de Julia.
À la période des fêtes de 2013, Lilith allait exploser. Sa sœur, ses amies et toutes ses habitudes de sa vie passée lui manquaient terriblement. Elle ne faisait que penser à eux, à ce qu’ils faisaient pendant ce temps là et sans elle. Pendant les dernières semaines, elle pensait à Winter. Il l’avait faite croupir ici pendant 11 mois. Elle ne voulait que se venger pendant cette période d’enfermement. Calée dans un coin de la cellule, clope à la bouche, visage enfoui dans ses bras, elle faisait presque une dépression nerveuse.
Il ne se passa pas grand chose après la fin janvier. Toujours seule dans son coin, elle avait finalement appris à ignorer comme elle pouvait les insultes de Michelle qui n’avait jamais cessé. Lilith se demandait combien de temps elle devait encore être ici. Elle agissait depuis un an comme si elle n’allait jamais en sortir et qu’elle finirait, de toute façon, par mourir ici. C’était étrange. Terrée comme un animal dans son terrier, Lilith ne bougeait presque plus de son coin, elle ne quittait plus sa cigarette non plus. Quand elle avait le droit d’avoir une goutte d’alcool sous la main, elle l’avalait cul-sec. Et pour bonne conduite, elle gagna à sortir 2 semaines plus tôt que prévu, le 27 février 2014, la veille de son anniversaire.
Sa sortie fut sa renaissance. Lilith était folle de joie de sortir, de revoir sa sœur, ses amis, et surtout, l’être pour son anniversaire. Cependant, la Lilith qui était sortie de prison ce jour-là, ce n’était pas celle qui y était entrée. Elle avait profondément changé : ses proches peuvent vous le dire mieux que quiconque. Surtout Chanel. Avant, elle n’était pas une jeune fille facile, c’est chose sûre. Mais là, c’est encore pire. Des fois, elle était tout bonnement ingérable. Une vraie pile électrique qui explosait tout ce qu’elle touchait. En revanche, des fois, elle restait dans sa chambre, dans le noir, dans un coin, comme du temps de sa cellule.
Bien sûr, quelques uns auront essayé de savoir ce qu’il s’est passé pendant cette année là. Mais elle ne voulait pas en parler, à personne. Comme elle disait des fois : « Ce qui s’est passé là-bas doit rester là-bas. » Quand la question était abordée, elle essayait de l’éviter, par une blague ou un habile changement de sujet.
Depuis ce mois de liberté, elle a appris une chose : La vie vaut la peine d’être vécue. Avant tout cela, elle n’était pas du genre à sortir le soir pour faire la fête. Maintenant, elle le faisait le plus souvent possible, sortait avec ses amis, rigolait, profitait de la vie. En ce point-là, la prison l’a améliorée. Seulement, ce n’est pas tout le temps. Un jour noir, un jour blanc.
Elle n’a pas abandonné sa sœur dans le business de la drogue. Elle estime que ce n’est pas de la faute de ces poudres qui l’ont envoyée là-bas. Kevin Winter en est la cause. Peut-être était-ce puéril de se raccrocher à cette pensée, mais elle s’en était convaincue lors de ses dernières semaines. Depuis qu’elle est sortie, elle ne l’a jamais revu, elle ne lui a jamais reparlé. Elle monte encore sa vengeance, parce que c’est sûr qu’elle n’allait pas laisser ça couler ainsi. Elle avait confiance en lu et il l’a bafouée. Elle voulait qu’il paie.