« Monsieur Duncan, vous avez une maladie cardiaque considérable… » La nouvelle tomba aussi violemment que si je m’étais fait écraser par une voiture, et encore là, je pensais que ça aurait fait encore moins mal. Jamais je n’aurais pu m’attendre à une chose pareille. Tout me semblait si banal dans un premier temps, je pensais simplement me faire dire que je ne m’habituais pas au changement de climat, que le temps chaud et ensoleillé des Bahamas demandait un certain temps d’adaptation, d’où le fait que je me sentais toujours un peu plus fatigué quand je faisais mon jogging matinal ou bien quand j’allais frapper des balles dans les terrains d’entrainement. Je ne pensais certainement pas me faire annoncer une telle chose, une nouvelle qui avait le pouvoir de changer ma vie, ou du moins, c’était ce que je sentais. Bien sûr, il faudrait que j’aurais plus de détails, parce qu’impulsif de nature, je serais du genre à me faire des idées en un rien. Heureusement, j’avais su garder mon calme – probablement parce que j’étais beaucoup trop choqué pour faire autrement – et après avoir dégluti avec difficulté, je dis : « C’est… C’est-à-dire ? » À ce moment, le médecin se lança dans une tonne d’explications scientifiques. Je n’en compris pas un mot, ou du moins, pas tant qu’il me dit : « Vous allez devoir prendre des médicaments tous les jours, avoir des examens régulièrement et surtout, diminuer sur les activités physique. » « Qu… quoi ? Que voulez-vous dire par activités physiques ? » Le médecin inspira profondément, et ce n’était pas bon signe, je le savais. Puis, il ajouta : « Vous devez vous en tenir à des activités modérées, au maximum trois fois par semaine. Aucun effort trop exigeant. » Je m’affalai alors dans le fauteuil, complètement abasourdi. Je commençai alors à répéter « Vous ne pouvez pas me faire ça… vous ne pouvez pas faire ça… », puis, lorsque le médecin continua, comme si je n’existais pas, comme s’il parlait à un mur : « Et idéalement, vous allez devoir prévenir vos proches, si jamais il arrive quelque chose. » Ce fut trop ; je me levai, et je dis, un peu trop fort et trop sèchement : « Les prévenir de quoi ? Que je vais mourir ? Que ma vie est fichue !? Vous ne comprenez pas, sans le sport, je ne suis rien ! » Et c’était vrai ; oui, j’avais des gens autour de moi, deux personnes en particulier, mais après, niveau passion, niveau identité, niveau intérêt dans ma vie, je n’avais rien d’autre que ma potentielle carrière sportive, le baseball, en particulier. C’était au collège que j’avais découvert ma passion et mes capacités à faire partie d’une équipe, et franchement, tout cela m’avait sauvé la vie. Je n’avais jamais été doué en cours, et je ne voulais pas avoir grand-chose à faire avec ma famille, sauf avec mon frère, Evan, le seul sur qui je pouvais réellement compter. J’étais un cancre à l’école, et mes talents dans l’équipe de baseball étaient tout ce qui m’avaient permis à avoir mon diplôme, et plus récemment, une bourse d’études ainsi qu’une place de choix dans l’équipe de l’université de Nassau. Tout se passait bien, j’étais heureux avec mon frère et ma petite amie, Lela, non, Sadya maintenant, avec qui je venais d’emménager ici, mais maintenant, tout venait d’être gâché par cette annonce, annonce qui me perturbait grandement, mais qui ne faisait pas flancher le médecin qui poursuivit en disant : « Je suis sincèrement désolé, mais je crois qu’une grande réflexion vous attend… » Cette fois-ci, je ne dis rien, reprenant place dans mon fauteuil en mettant mon visage dans mes mains, complètement perdu. « Voici votre ordonnance pour les médicaments. Je vais vous revoir dans deux semaines. » Saisissant que c’était là mon signal pour partir, je pris le papier, puis je ne remerciai pas le médecin, prenant aussitôt la porte et m’éloignant de l’hôpital le plus rapidement possible pour hurler de rage, de désespoir, devant le pire choix de ma vie. C’était un choix que je voulais faire seul. Sadya et Evan le sauraient seulement lorsque j’aurais pris ma décision, pas avant. Je les adorais, mais ils ne pourraient pas comprendre… J’étais maintenant seul avec moi-même, et cette maladie que je n’avais pas demandée, qui allait ruiner tout mon bonheur.