"Alors que tu traverses l’aire des visiteurs de l’aéroport international de Nassau, tu remarques aussitôt la nette différence par rapport à ton pays natal que tu viens de quitter avec une valise à la main, un sac sur l’épaule, et un carton d’invitation accompagnant ton billet d’avion entre les mains. Alors que tu n’as même pas encore respiré l’air bahamien, tu sais déjà qu’ici, ça sent les vacances, et ça ne fait que se confirmer quand tu montes dans le taxi et que la radio passe une musique exotique que l’on entend en trame de fond dans ces émissions de télévision qui présentent les coins les plus paradisiaques du globe. Toi, tu te trouves dans l’un d’eux, tu es devenu un vacancier invité cordialement par le Coconut Paradise Hotel afin de venir passer un mois de vacances tous frais payés, où ton boulot, c’est de penser à ta propre personne, te reposer et profiter du soleil, des cocktails à volonté et de la luxure qui va t’entourer pendant les prochaines semaines.

Dans cet endroit paradisiaque, tu as l’impression d’être plongé dans la brochure que l’hôtel t’a envoyée pour accompagner ton invitation, t’introduisant les plus beaux endroits du complexe en premier plan. La brochure t’a vendue du rêve, et cet endroit t’en vend encore plus, maintenant que tu as l’opportunité de voir tout ce que l’hôtel peut t’offrir. Tu as l’impression d’être entré dans un autre monde, que tu seras traité comme une personne de la royauté pendant tout ton séjour. Dès le début, cette idée se concrétise; les employés te traitent comme un roi, ton lit est confortable est moelleux, tout est préparé à la perfection juste pour toi et personne d’autre. Aux premiers abords, tu te demandes si la vie est toujours comme ça, si les Bahamas est en fait un petit paradis perdu où il est enfin possible de connaître la richesse et le sentiment d’importance, la capacité de pouvoir tout diriger d’un claquement de doigts.

Cependant, après quelque temps, tu creuses un peu plus, et tu réalises que derrière toute cette beauté et cet exotisme, il y a quelque chose de plus classique, que tu connais déjà et que tu as tenté de fuir en acceptant cette fameuse invitation. Ces gens qui te servent, qui t’entourent quand tu te promènes dans les rues, ce n’est pas des robots qui servent à faire joli dans le décor, qui donnent une ambiance plus chaleureuse; ce sont des personnes qui ont une vie, des joies, des peines, des problèmes. Ça, on ne le voit pas dans les brochures, parce que les brochures ne vendent que les vacances, pas le fait qu’il y a moyen de rester plus longtemps, qu’il y a moyen de venir ici pour déménager, construire une nouvelle vie, débuter avec une ardoise propre, oublier le passé.

Peut-être le temps est venu de te laisser aller aussi. Tu en as assez bavé, peut-être que tu en baveras encore ici, mais sous le soleil, ça te semble soudainement moins pénible. Beaucoup ont déjà pris cette initiative, semble-t-il, as-tu envie de la prendre aussi ?"