Quand j'avais une dizaine d'années, on m'a demandé de faire mon abre généalogique à l'école. J'avais toujours cru que mes parents étaient Wendy et John Scott. Je ne trouvais pas non plus bizarre d'avoir un frère noir ou une sœur asiatique. Ca ne m'avait pas semblé bizarre non plus d'avoir une bonne dizaine de frères et sœurs tous plus différents les uns des autres. Ce n'était qu'à ce moment-là que je me suis intéressée à mes origines. Le soir, j'ai demandé à ma mère :
-Maman, comment ça se fait que Jason est noir et que Gemma est asiatique ?
-Jason et Gemma ont été adoptés... Comme tous tes frères et sœurs, Ophelia. , m'avait dit ma mère.
-Tous ? Et moi, j'ai été adoptée ?, avais-je demandé.
-Oui... Tu aimerais en savoir plus sur ta naissance, je suppose.
-Oui, Maman. J'aimerais beaucoup...

Il s'en était suivi une discussion où toutes les petites choses étranges de ma vie d'enfant adoptée s'étaient remises en place dans ma tête. Ma mère, Wendy, m'avait expliqué que ma mère biologique était morte en me donnant la vie et que mon père biologique était parti bien avant ma naissance. J'avais été confiée aux services d'adoption grecs étant donné que ma mère était grecque. Quelques semaines plus tard, Wendy et John étaient venus me chercher à Corinthe. Je ne su rien de plus sur ma mère. Mes parents n'avaient eu accès ni à son nom, ni à sa photo... Je crois que je suis un peu triste de ne rien savoir sur ma mère biologique mais je suis tombée dans une bonne famille alors c'est un mal pour un bien.

Oh oui ! En parlant de famille, il faut que je vous parle un peu de la mienne. Comme je vous l'ai déjà dit je viens d'une famille nombreuse. J'ai 6 frères et 5 sœurs et nous venons tous de pays différents. Jason venait d'Afrique du Sud, Mark d'Allemagne, Charles d'Australie, Henry d'Angleterre, Peter d'Italie, Logan du Canada. Gemma, elle, venait du Vietnam, Lisa de France, Lucy d'Espagne, Theresa de Roumanie et Rose du Mexique. Vous voyez un peu le tableau. Logan et moi étions les plus jeunes, nous étions d'ailleurs nés la même année. La plus vieille, Gemma, a 13 ans de plus que moi. Wendy et John étaient propriétaires d'un grand corps de ferme , dans le Vermont, transformé en maison. Je ne vous dis pas comment ça pouvait être agité à la maison mais au moins, on ne s'ennuyait pas ! Je me souviendrai toujours de nos dimanches après-midi, après la messe et le repas dominical. Ah oui ! L'une des choses essentielles pour mes parents adoptifs était la religion. Ils étaient de fervents chrétiens et ils ont élevés dans cette foi un peu extrême, je dois dire. Ils étaient du genre « mormonts » : mariage, grande famille, éducation religieuse importante, éducation stricte. En fait, on a tous embrassé cette foi. Aucuns de mes frères et sœurs n'a désobéi à la « règle de mes parents » : pas de sexe avant le mariage à part Logan et Henry : Logan parce qu'il n'a jamais eu la foi et ne voulait pas mentir là dessus et Henry parce qu'il était gay et qu'il ne croit pas vraiment au mariage alors qu'il est avec le même homme depuis déjà quatre ans. Personnellement, la religion ne me pèse pas et je n'ai jamais compris pourquoi c'était si excitant de passer outre les règles. Enfin, d'un autre côté, je suis heureuse de pouvoir vivre ma vie librement.

Maintenant que vous connaissez ma famille, je vais vous parler un peu de mon histoire qui n'est pas une histoire remplie de drame. Au contraire, elle est plutôt joyeuse, pleine de vie et de rêve même si j'ai longtemps été « brimée » par la foi envahissante de mes parents ou leur amour étouffant, je ne sais pas trop ce qui les a fait nous surprotéger ainsi. Néanmoins, mon histoire a sa part d'ombre, je vous préviens.
Avant de savoir que j'ai été adoptée, j'étais une enfance sans grands problèmes ni histoires. J'étais bonne élève, j'aimais lire mais j'étais aussi plutôt turbulente. J'adorais grimper aux arbres, jouer avec les garçons, etc. Je me souviens aussi qu'à cette époque bénie de ma vie, mes seuls rêves était d'être la demoiselle d'honneur au mariage de Gemma et de faire un véritable mariage de princesse quand je serais en âge de me marier. Je me rappelle d'un jour en particulier, j'allais sur mes sept ans : Gemma était dans le salon avec son petit-ami, Derek, ils faisaient les préparatifs de leur mariage avec ma mère. Je me souviens de mon père emmenant Derek avec lui pour lui dire de bien faire attention à Gemma et de ne pas lui faire du mal sinon il était très mal. Pendant ce temps-là, Lucy avait posé une question à Maman sur la nécessité du mariage. Je ne me souviens pas de la réponse exacte de ma mère mais je me souviens de la réaction que ça m'avait procuré. J'avais compris pourquoi nos parents nous avaient imposé leurs règles bien qu'elles n'étaient ni meilleures ni pires que d'autre : nos parents voulaient nous donner une base solide sur laquelle nous pourrions nous épanouir... Enfin, ça c'était surtout vrai pour les plus jeunes car au fur et à mesure, nos parents devinrent plus cool concernant nos croyances. Le jour de mon neuvième anniversaire, arriva Logan, mon dernier frère adoptif. Il était déjà un enfant à problème mais mes parents voulaient sauver le monde alors ils ont fait tout leur possible pour le faire aller dans le bon chemin. Etrangement, je devins rapidement très proche de Logan. Puis il y eu le devoir sur l'arbre généalogique. Quelques temps plus tard, trois de mes frères et sœurs étaient partis à l'université. Pour gagner un peu d'argent en plus, mes parents ont décidé d'ouvrir un « Bed and Breakfast » en mettant à disposition les quatre ou cinq chambres libres de la maison.

Jusqu'à mes treize ans, les années se suivirent et se ressemblaient. L'année de mes treize ans, je devins une femme ou plutôt un ersazt de femme. Je n'avais pas osé demander à ma mère ce qu'était « avoir ses règles », etc. J'avais préférais demander à Lucy. Cette année-là aussi, j'avais déménagé ma chambre au grenier, j'avais besoin d'avoir mon espace et ce n'était pas en partageant une chambre avec Rose et Theresa que j'allais avoir mon espace ! L'année suivante, je participais à un échange scolaire. Je correspondais avec une Irlandaise, Shea, puis je suis allée en Irlande dans sa famille avant qu'elle vienne dans ma famille. Ce petit moment en Irlande fut une véritable libération. Je me sentais bien loin de la pression familiale. Je découvrais une autre façon de vivre même si je ne pu pas en profiter à fond vu mon jeune âge.
Le petit monde de la famille Scott fut secoué, mais pas détruit, l'année suivante, en 2010. Le problème était Logan, si on pouvait dire. Logan était mal dans sa peau. Il avait connu ses parents contrairement à moi ou à nos autres frères et sœurs. Ses parents lui manquaient. Il avait commencé à avoir des mauvaises notes à l'école puis il commença à fréquenter sérieusement les filles et puis il y eut la cigarette et l'alcool. Curieusement, j'étais fascinée par ce pauvre garçon, je le trouvais touchant. J'avais toujours eu beaucoup d'empathie et c'était pour cela que je refusais de manger de la viande depuis que j'avais neuf ans -je ne supportais pas l'idée d'avoir indirectement tué un animal. Un soir, en Décembre 2010, Logan était rentré tard. Je l'avais vu de la fenêtre de ma chambre -en fait, je le surveillais-. Il titubait et était presque tombé évanoui dans la neige, puis il s'était relevé et était allé jusqu'à la vieille grange. J'étais descendue en pantalon de pyjama, t-shirt, pull informe et bottes enfilées à la va-vite. Je l'avais rejoins
-Allez, Logan, on va rentrer à la maison...
-Nan, Oph'. Je peux pas rentrer à la maison. Les parents vont nous faire la gueule et puis... Je suis trop fatigué pour aller jusqu'à la maison.
Il disait être fatigué mais il avait allumé une cigarette et semblait avoir envie de discuter . Nous nous installâmes sur un matelas qu'on avait installé dans la grange l'été précédent pour pouvoir y dormir quand on avait nos amis à la maison. Il y avait des couvertures. J'enveloppais Logan dans 'lune de ces couvertures et l'encourageais à parler. Il me parla de son mal-être. Ca me fit mal au cœur. Je l'avais pris dans mes bras pour le rassurer, le consoler et lui montrer que j'étais là. J'avais même pleurer dans ça m'avait rendue triste de le voir dans cet état. Il avait écrasé son mégot de cigarette sous sa semelle avant de se lever pour le jeter dans la neige et éviter de faire brûler la grange. Puis il était revenu s'asseoir à côté de moi, il avait passé son bras autour de mes épaules. Sa main avait caressé ma joue puis, en blottissant sa tête dans mon cou, ses lèvre effleurèrent mon cou. Un frisson parcourru mon échine.
-Logan ! Ca va ? Tu... Tu ne..., bafouillais-je, inquiète.
-Ne t'inquiète pas. Je...Je veux juste être contre toi.
-Quoi?
Je trouvais ça bizarre. J'étais innocente. Je ne connaissais rien à l'attirance, à l'amour ou au sexe.
-Je t'adore... Tu es gentille, douce... Tout ce qu'il me faut. Je crois que...
Il n'avait pas fini sa phrase mais il voulait dire « Je t'aime ». A la place, il préféra m'embrasser. C'était un baiser maladroit, j'étais trop surprise pour réagir. Je me doutais que cette drôle d'odeur âcre et amère de sa bouche était un mélange de la fumée de ses cigarettes et de l'alcool même si je ne connaissais que l'odeur de l'alcool. Quelque chose me gênais dans ce baiser. Logan était mon frère. Un frère n'était pas censé embrasser sa sœur comme ça. Enfin, on n'avait pas de liens de sang mais c'était tout comme. Sachant son mal-être, je mis mon mouchoir sur cet incident et lui dit :
-Logan, il faut que tu dormes. Demain ça ira mieux.N'aie pas peur, je reste avec toi.
Je lui avais retiré ses chaussures avant d'ôter mes bottes. Je l'avais couché sur le côté et m'étais collée contre lui, j'avais rabattu trois grandes couvertures sur nous et avais passé mes bras autour de sa taille. C'était mon frère, je l'aimais mais pas de la façon dont il m'aimait. Comme je l'aimais, je ne voulais pas le perdre et par conséquent, je m'occupais bien de lui. Le lendemain soir, après avoir désaoulé, Logan état venu me voir dans ma chambre pour me demander pardon. Cependant il me dit aussi qu'il ne regrettait pas de m'av oir embrasser parce qu'il était vraiment amoureux de moi. Je ne savais pas comment réagir et je ne sais toujours pas comment j'aurais dû réagir à l'époque.

Jusqu'à mes dix-huit ans rien d'étrange ne se produisit. Logan restait égal à lui-même et même s'il était amoureux de moi, il sortait avec des filles qu'il me présentait toujours. Il devait essayer de me faire enrager. Sauf que je n'étais pas ainsi. Moi, je ne suis pas tombée amoureuse. Je suis vaguement sortie avec un garçon pendant ma dernière année de lycée mais on s'est séparé en amis à la fin de l'année scolaire. Aujourd'hui, il est toujours mon meilleur-ami. Et puis, à la fin du mois de Juin 2013, Henry est revenu à la maison. Henry faisait des études à Harvard, il faut dire qu'il était brillant. Il était arrivé dans le salon en nous disant qu'il avait trouvé son âme-soeur à Harvard mais que cette personne était un peu particulière. Nous avions directement pensé que sa petite-amie était laide, handicapée, excentrique ou quelque chose comme ça mais non. Quel ne fut pas notre choc quand on vit débarquer un Apollon dans notre salon. Au début, Maman avait rigolé. Elle avait cru que c'était une blague. Quand elle vit Henry prendre l'Apollon par la main et l'embrasser sur les lèvres, elle avait blêmi. Mais au fur et à mesure, elle accepta que son fils aimait un autre homme. Mon père aussi même s'il précisa qu'il trouvait cela contre-nature quand même mais que ce n'était pas bien grave si Henry était heureux. Moi, j'étais fière de voir que mes parents n'étaient pas des gens enfermés dans leurs petites croyances même si elles avaient une grande importance dans leurs vies. Au mois de Septembre de cette année-là, j'entrais à l'université locale, tout comme Logan d'ailleurs. Mon frère s'était un peu repris depuis le lycée. Il ne buvait plus autant, il ne se droguait pas (bien qu'il avait pris quelques drogues pendant sa période sombre). Cependant, il y avait chez lui quelque chose qui me faisait de plus en plus peur même si je ne savais pas quoi. Ma première année de fac se déroula sans encombre. C'était juste un merveille. Je me sentais plus autonome, plus libre de mes mouvements. C'était un peu une délivrance mais il y avait Logan qui me collait, m'épiait. Il était toujours amoureux de moi, il me l'avait dit le jour où Henry avait avoué son homosexualité. Puis un soir, ce fut l'explosion. Ca devait être en Mai 2014. On était à la ferme, nos parents étaient partis se faire une petite virée romantique, ils avaient bien le droit. On avait des clients du « Bed and Breakfast » mais Logan avait une idée derrière la tête, une idée qui ne le quittait plus depuis des semaines. Il me voulait. Innocemment, je regardais un film avec lui quand il commença à se rapprocher de moi. Il me touchait la cuisse, je le repoussais. Puis il revint à la charge. Il glissa sa main sur ma poitrine. Je l'enlevais sans ménagement et partis. Il ne l'entendait pas de cette oreille là. Il me plaqua au sol, m'embrassa à différents endroits du corps. Je me retenais de pleurer mais j'avais les larmes aux yeux. Je ne voulais pas qu'il me touche. Pas comme ça. Puis il avait carrément essayer de m'enlever mes vêtements. Là, je me mis à crier. Je tentais de le frapper, en vain. Pour m'en dissuader, il me frappa au visage deux ou trois fois. Je continuais de crier et de pleurer. J'espérais que quelqu'un m'entende. Heureusement pour moi, l'un des clients était resté. Manque de chance pour mon frère, c'était un policier. Il était descendu avec son arme de service et les menottes qu'il avait toujours sur lui. Logan était bientôt accroché au radiateur et la police fut prévenue. J'avais pleuré dans les bras de mon sauveur. Il y eut un procès pour tentative de viol. Je le gagnai et presque immédiatement, je me sentis protégée par la loi. Cependant, même si mon frère était enfermé pendant quelques temps et qu'une injonction me protégeais, je décidais de partir du Vermont (tout en promettant d'y revenir de temps à autres notamment pour les réunions de famille et les fêtes religieuses). Je m'étais rappelée de Shea. J'avais pris de ses nouvelles et elle m'avait dit qu'elle vivait à Nassau, aux Bahamas. C'était décidé : je partais pour les Bahamas. J'y aurais déjà un endroit pour vivre le temps de trouver un appartement. C'est ainsi que je dis au revoir à près de vingt ans passés dans une famille aimante (parfois trop et mal). Je m'envolais le 24 Juillet 2014. J'allais vivre une nouvelle vie.